Le mariage clandestin de mademoiselle Stockalper
Une nouvelle du Valais du 18ème siècle en 5 suites.
Dernière suite
Effectivement, on se retrouva. La future mariée hésita encore. Ferdinand se mit à genoux, embrassa les mains de sa bien-aimée. Lui jura fidélité éternelle. «Je t’aime. Je veux t’épouser. Passons devant le curé.»
Margaretha hésita toujours. Alors Ferdinand changea de registre: «Gritli, c’est maintenant ou jamais! Tu ne peux pas me compromettre de cette façon. J’ai tout fait pour nous unir secrètement. Ne comptant ni le temps ni l’argent dépensé. Maintenant il faut que ça se fasse!»
Et, ô surprise, elle fut d’accord. Dignement, le prêtre exerça sa fonction et bénit le mariage. Le couple se retira dans la pièce voisine. Peu de temps après, Ferdinand réapparût, le contrat de mariage signé à la main. Le notaire l’authentifia et les témoins le certifièrent.
«Pour couper l’herbe sous le pied à toute tentative d’annulation de cette union, il n’y a qu’un moyen efficace» dit Augustini sagement, «il faut consommer le mariage sans tarder». Il ordonna donc à Ferdinand de se retirer à nouveau dans la chambre séparée et de s’unir à son épouse aussi physiquement.
Le reste de la compagnie s’installa autour de la table de la cuisine. Elle buvait à la santé des mariés. Cette fois-ci l’attente dura plus longtemps. Enfin, le couple réapparut, rayonnant de bonheur. On fêta le mariage.
Le vieux baron Stockalper mourut sans avoir appris le mariage clandestin de sa fille. Quelques jours après ses funérailles le coup devint public. Ferdinand avait informé le fils Kaspar Eugen Stockalper, le nouveau chef de clan, de l’alliance entre les deux familles.
Toute la vallée du Rhône était en effervescence. L’exploit d’Augustini devenait le sujet de conversation du jour. L’évêque était vexé d’avoir été ignoré par le nonce. Le chancelier bouillonnait de rage devant les machinations d’Augustini. A Brigue, l’enfer s’était déchaîné. Les frères Stockalper employaient tous les moyens pour contrecarrer l’affreuse manipulation. Ce mariage doit être déclaré nul et non avenu! Augustini riait sous cape. Le résultat de l’examen de la dispense montrait sa validité. En dernier recours on questionnait le confesseur de Margaretha. Lorsqu’il confirma que le mariage avait été conclu dans les règles, le dossier fut officiellement clos, au grand dam des Stockalper. Ferdinand fut convoqué à Brigue pour régulariser la dot.
Augustini triompha: «J’ai battu les Stockalper à plate couture!» Et plus tard, à un collègue romand «La vengeance est un plat qui se mange froid!»
La liaison entre Ferdinand et Margaretha n’était pas née sous une bonne étoile. L’amour qui présageait le survol de tous les obstacles dans un élan juvénile ne tenait pas ses promesses. Dans les dix années suivantes, Ferdinand réussit à joindre l’état de noblesse des Habsbourg et à devenir un des hommes les plus riches du Valais. Le mariage avec la fille Stockalper lui avait procuré la base financière pour se lancer. Puis l’héritage du grand-oncle de Vienne, le baron Johann Julier von Badenthal-von Werra, lui avait apporté une richesse énorme. Son amour pour Margaretha s’éteignît complètement quand il comprit qu’elle ne pouvait pas lui donner un fils. Il la bannit au couvent cistercien des Bernardines à Collombey-Muraz. Dans le but de sauver le nom de famille et de maintenir le titre de baron il obtint, à nouveau par une dispense apostolique de Lucerne, le mariage de sa fille cadette Rosalie avec un cousin au quatrième degré. Ce couple et leurs descendants continuèrent la lignée jusqu’à nos jours.
Bibliographie
Baron Ferdinand I. von Werra (Kekulé 32 zum Autor), voller Name: Joseph Tadeus Franz Xaver Ferdinand Valentin, *getauft in Salgesch VS 14.9.1770 / † Leuk-Stadt VS 3.3.1824, Lebensorte: Salgesch VS, Leuk-Stadt VS, Wien.
Baron Kaspar Jodok II. von Stockalper, voller Name Franz Kaspar Jodok Ignaz Georg (er nennt sich auch Kaspar Jost), *getauft in Glis VS 25.12.1713 / † Glis VS, Begräbnis 30.4.1795, Lebensort: Brig VS.
Maria-Antoine Augustini, genannt Anton de Augustini *Macugnaga (Valle Anzasca, I) 4.8.1743 / † Leuk-Stadt VS 18.6.1823.
Weitere direkte Vorfahren des Autors sind: Magdalena von Stockalper, Frau von Ferdinand.
Sources
Donnet, André: Personnages du Valais fichés par l’administration française de département du Simplon, Vallesia, bulletin annuel de la Bibliothèque et les Archives cantonales du Valais, des Musées de Valère et de la Majorie, Band XLI, Jahrgang 1986, Seite 230 (Ferdinand Werra), S. 195 ff. (Stockalper), S. 228 (Marie-Antoine Augustini).
von Werra, Raphael: Eine ungewöhnliche Heiratsgeschichte, Blätter aus der Walliser Geschichte, XXII. Band, Jahrgang 1990, S. 5 ff., S. 157.
Meichtry, Wilfried: Die Walliser Adelsfamilie von Werra zwischen Ancien Régime und Moderne, Diss., Bern 2000.
Kalbermatten, Philippe: Schwester Xaveria Stockalper (1755–1810) und das Kloster Kaufbeuren, Blätter aus der Walliser Geschichte, XLII. Band, 2010, Seite 79–119.
Imboden, Gabriel: Tagebuch der Alpfahrten des Kaspar Jodok II. von Stockalper 1756–1765, Blätter aus der Walliser Geschichte, XXV, 1993, S. 191–210.
Rossi, H.: Kaspar Eugen Stockalper vom Thurm, Diss., Uni Freiburg i. Ue. 1942, Paulusdruckerei.
Arnold, Peter: Das Testament des Markgrafen von Augustini, Blätter aus der Walliser Geschichte, XVI. Band, 1. Jahrgang 1974, S. 5 ff.
Willisch, Patrick: Anton de Augustini (1743–1823): ein Walliser Politiker zwischen Revolution und Restauration, Blätter aus der Walliser Geschichte, Band 24, 1992, S. 5–124.
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